Correction sous-forme de plan détaillé :
-analyse grammaticale de la citation :La citation est très articulée par des liens logiques : « Par suite, car, plus vraie : parce que, plus fausse : parce que, mais c’est néanmoins, bref, de sorte que . »
Les deux sujets principaux sont représentés par les pronoms personnels « je »(le poète) et « il »(le langage de ce poète).Le texte repose sur une série de paradoxes et de retournements. Jean-Claude Renard nous fait assister à une inter-réaction entre « je » et « il ».
Les deux premières phrases posent deux images essentielles : « racine » et « miroir ».
La conséquence finale est exprimée par le biais d’une phrase interrogative.
I-Analyse du point de vue de Jean-Claude Renard L’expérience poétique pour Jean-Claude Renard s’inscrit à la fois contre les conceptions classiques du langage poétique et contre des conceptions contemporaines marquées par le structuralisme.
-contre la tradition classique
Dans la tradition classique le poète est toujours lucide de son œuvre, il est détenteur d’un langage transparent (Art poétique ,Boileau).
-contre les conceptions contemporaines marquées par le structuralisme
Le poète est dessaisi du langage, il devient un lieu traversé par le langage.
-point de vue de Jean-Claude Renard
Pour lui, le langage est le lieu d’une liturgie (Claudel, Saint-John Perse ). Le langage serait un moyen de faire advenir l’être (Heidegger ).
L’image du miroir « à double réflexion où je reconnais ce que je suis et ce que je ne suis pas » n’a aucun rapport avec le mythe de Narcisse tel que Valéry l’a repris dans l’étude sur ce mythe.
Il s’agit d’un miroir qui trahit le poète - trahir au sens de faire sortir de, tirer ( pour Yves Bonnefoy, la poésie consiste « à nommer ce qui se perd »).Cette expérience poétique est positive puisqu’elle fait sortir le poète de soi.
Elle s’inscrit dans la dissociation syntaxique : « Plus vraie(…)Plus fausse ».
II- Image plus vraie, image plus fausse -le langage « m’explore et me dénude »
A l’image de l’expérience psychanalytique, le poète, par le langage, peut arriver à son moi profond.
La pratique de la poésie favoriserait l’advenue du sujet.(La parole en archipel, René Char, « Pour renouer » : mise au jour de l’Etre à travers un programme éthique et esthétique qui consiste à « jeter bas l’existence laidement accumulée et retrouver le regard qu’il aimait assez en son début pour étaler son fondement »).
-le langage « me dissimule et me change en sa fable »
Comme Jean-Claude Renard Saint-John Perse s’insurge contre les pièges du langage poétique : « Fange écarlate du langage, assez de ton infatuation ! ».
-« Mais c’est néanmoins un miroir où se dévoile ce que je fonde et ce qu’il fonde »
Dans l’acte de la création le sujet se donne tel qu’il est avec ses manques et avec ses qualités. Mais au moment où il crée il se trouve transformé par ce qu’il crée. La création poétique fait intervenir un sujet non sacralisé. (La parole en archipel, rené Char, « Le rempart de brindilles » : « le dessein de la poésie étant de nous rendre souverain en nous impersonnalisant , nous touchons, grâce au poème, à la plénitude de ce qui n’était qu’esquisse ou déformé par les vantardises de l’individu ».
Le langage poétique opère un miracle. En effet, une transmutation s’effectue puisqu’une chose en devient une autre. La parole ouvre sur une décantation.
III-Le langage poétique irremplaçableLe langage poétique n’est ni une mimèsis ni un outil de communication :
-Crise de vers, Mallarmé, « Variations sur un sujet »
-Discours de Stockholm, Saint-John Perse : « La poésie est le lieu où se transmet le mouvement même de l’être »
-Il y a, Apollinaire
-Cinq grandes Odes, II, Claudel
-« Aube », Rimbaud.
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